L'éducation des filles pauvres à la fin du XVIIe siècle : le témoignage des cahiers d'inspection lyonnais
Résumé
En 1665, Charles Démia lance un appel aux élites lyonnaises (les Remontrances), afin de promouvoir l’instruction des enfants pauvres de la ville par la création des petites écoles. Véritables écoles primaires de l’Ancien Régime, les établissements qui résultent de cette initiative sont censés appliquer la pédagogie établie par le prêtre, notamment en matière de religion. Or ces écoles ne sont pas seulement destinées aux garçons, mais aussi aux filles, et les sources sont suffisamment riches pour se faire une image différenciée, en théorie et en pratique, de l’enseignement dispensé à l’égard de celles-ci, et, plus généralement, des préceptes de pédagogie féminine en jeu. Assez bien connus, souvent commentés (notamment par Bernard Grosperrin dans son ouvrage Les petites écoles sous l’Ancien Régime), les Reglemens de Charles Démia donnent la lignée officielle de la pédagogie pratiquée au sein des petites écoles. Mais à côté de ces normes existent aussi des sources renseignant sur la pratique : c’est par l’utilisation de petits cahiers d’inspection que les recteurs de ces écoles rendent compte de ce qui s’y passe, des suivis ou digressions pédagogiques observées. Ces cahiers contiennent en effet, outre les noms des enseignants et les effectifs d’élèves, des commentaires relatifs à la manière de bien apprendre les enseignements préconisés par Charles Démia, et principalement l’enseignement du catéchisme ; ils sont conservés pour les années 1678,1679, 1682,1688, 1694 et 1696. Dans notre communication, nous nous proposons de confronter ces deux sources, ce qui nous permettra d’entrer au cœur de l’enseignement transmis à ces petites filles pauvres et de sonder les limites qui lui sont propres. Enfin, nous nous efforcerons d’analyser, dans une partie conclusive, comment le projet de Démia, dans ses objectifs profanes et religieux, s’inscrit dans le débat plus large concernant l’enseignement et la pédagogie féminine à la fin du XVIIe siècle.