Du physicien agriculteur du 18e siècle à l’agronome des 19e et 20e siècles - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Comptes Rendus de l'Académie d'Agriculture de France Année : 2001

From the agriculturist of the 18th century to the agronomist of the 19th and 20th centuries

Du physicien agriculteur du 18e siècle à l’agronome des 19e et 20e siècles

Gilles Denis

Résumé

Agronomy (agricultural sciences field) was formed in the middle of the XIXth century with the setting up of research, popularization and teaching institutions which define agronomist (agricultural scientist) function. The agronomist had nevertheless an immediate predecessor the « agriculturist » of the XVIIIth century, a personality committed to a movement which proposed to improve agriculture with the help of modern science, particularly within the framework of the agricultural societies. The agriculturist has appeared around 1750 as a result of the convergence of various movements : the search for improvement in arts and trades while relying on scientific experiment and professional experience, the emphasis on agriculture as central to the creation of wealth and the development of education in rural areas. Thus arises the question of which science to promote or create for the improvement of agriculture. Chemists and naturalists are eager to include it in their field. Others point to its specific objects pertaining both to the economy of nature and that of mankind. Some others envisage a particular science derived from agricultural activities just as architecture derives from the trades of carpenters and masons. Others remain sceptical about building up a science of agriculture as it is the realm of the irregular phenomena. At the turn of the century these reflections crop up in Great Britain following the loss of America and in France during the debate on public education. The same rift is to be found between those in favour of linking agriculture with existing sciences and those supporting the creation of a specific science. The latter vindicate their views in the middle of the XIXth century on the classification of sciences suggested by Ampère who define as whole specific science both the subject whose aims are « simple knowledge » and those whose aims are usefulness or enjoyment. With the distinction made between central science and subordinate sciences, as suggested by Thaer, these suggestions support and define the setting up of a specific agricultural university education. This coupled with the founding of testing and research agricultural experiment stations in the second half of the XIXth century formed the function of the agronomist (agriculture scientist) and the field of study of agronomy (of agricultural sciences). New subjects will emerge within this framework thus contributing to the development of the biological and social sciences and to the building of our societies. When the primary objectives were reached in the 1970’s with the phenomenon of overproduction the then crisis facing agronomical research was soon to be overtaken by the emergence of new objectives, new questions and new methods. The question of the meaning of a science for agriculture is revived. Similar positions to those adopted in the XVIIIth and XIXth centuries are expressed. Accordingly this field either belongs to the one of the chemistry of the living matter (biotechnology largely speaking), of scientific ecology or to the specific domain of the integration of the molecule to country planning and whole economy.
L’agronomie se met en place au milieu du XIXe siècle avec l’établissement d’institutions de recherche, de vulgarisation et d’enseignement qui définissent la fonction d’agronome. Celui-ci a néanmoins un prédécesseur immédiat le « physicien agriculteur » du XVIIIe siècle, personnalité inscrite dans un mouvement qui se propose d’améliorer l’agriculture en s’appuyant sur la science moderne notamment dans le cadre des sociétés d’agriculture. Le « physicien agriculteur » apparaît autour de 1750 à la convergence de divers mouvements, la recherche de l’amélioration des « arts et métiers » en s’appuyant à la fois sur l’expérience scientifique et l’expérience professionnelle, la reconnaissance de l’agriculture comme principale place dans la création des richesses, le développement de l’alphabétisation des campagnes. Se pose alors le problème de la nature de la science à mobiliser ou à créer pour améliorer l’agriculture. Des chimistes et des naturalistes se proposent de l’intégrer comme partie de leur propre discipline. D’autres mettent en avant la spécificité de ses objets relevant à la fois de l’économie de la nature et de celle de l’homme. Certains imaginent une science spécifique induite des faits agricoles comme l’architecture l’est des métiers de charpentier et de maçon. D’autres encore restent sceptiques sur la possibilité d’édifier une science de l’agriculture, celle-ci étant le domaine des irrégularités. Au tournant du siècle, ces réflexions reprennent de l’ampleur en Grande-Bretagne suite à la perte de l’Amérique et en France lors des discussions sur les projets d’instruction publique. On retrouve les mêmes oppositions entre tenants du rattachement à des disciplines préexistantes et partisans de la création d’une science particulière. Les seconds s’appuient au milieu du XIXe siècle sur les propositions de classification, notamment d’Ampère, qui identifient comme science à part entière aussi bien les disciplines ayant pour but la « simple connaissance » que celles ayant pour but l’utilité ou l’agrément. Avec la séparation faite, notamment par Thaer, entre science centrale et sciences accessoires, ces propositions soutiennent et définissent la mise en place d’un enseignement supérieur spécifique pour l’agriculture. La réalisation de celui-ci ainsi que celle des stations agronomiques de contrôle et de recherche dans la seconde moitié du XIXe siècle installent la fonction de l’agronome et le champ disciplinaire de l’agronomie. Des disciplines vont pouvoir s’y épanouir participant ainsi au développement des sciences du vivant et de l’homme et à l’édification des sociétés contemporaines. Lorsque les objectifs premiers, avec la surproduction, sont atteints dans les années 1970, la crise que rencontre alors la recherche agronomique est dépassée par l’émergence de nouveaux objectifs et questions et de nouvelles méthodes. La question du sens d’une science de l’agriculture est réactivée et l’on voit s’exprimer des positions similaires à celles des XVIIIe et XIXe siècles. Selon celles-ci, elle appartiendrait au domaine de l’application de la chimie du vivant (biotechnologie au sens large), de l’écologie scientifique ou bien à celui spécifique de l’intégration de la molécule à l’aménagement du territoire et à l’économie générale.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01289906 , version 1 (17-03-2016)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01289906 , version 1

Citer

Gilles Denis. Du physicien agriculteur du 18e siècle à l’agronome des 19e et 20e siècles : Mise en place d’un champ de recherche et d’enseignement. Comptes Rendus de l'Académie d'Agriculture de France, 2001, Les entretiens du Pradel 1ère édition Autour d'Olivier de Serres : pratiques agricoles et pensée agronomique, 87 (4). ⟨hal-01289906⟩
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