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Communication Dans Un Congrès Année : 2015

Au commencement était le Crime, et le Crime était avec la Société, et le Crime était la Société : le criminel comme Christ démoniaque de la paternité sociale

Lauren Bentolila-Fanon
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 971540
ELH

Résumé

Nous nous proposons de développer l’hypothèse selon laquelle l’imaginaire diabolique, attaché au criminel dans Ferragus et le « cycle Vautrin », viendrait non pas caractériser la dimension anomale du personnage mais définir son appartenance à la société même, exprimant l’irrémédiable association de celle-ci avec le Mal et le Crime. Le diabolique dépasserait donc chez Balzac la simple métaphore topique du Mal moral pour devenir le symbole d’un fonctionnement social perverti. Cette alliance est illustrée, de manière allégorique et exemplaire, par le motif du pacte diabolique, contracté entre un criminel – avatar du serpent tentateur ainsi que personnage anti-social – et un jeune homme en quête de pouvoir – être social – qui se damne. Ce couple, dont Balzac souligne l’essentielle unité, constituerait ainsi l’analogon d’un fonctionnement devenu celui du monde parisien dans lequel le pouvoir et la fortune – à tout prix – ont remplacé les hiérarchies et valeurs des siècles précédents. L’association du criminel et de l’arriviste mettrait ainsi au jour les mécanismes obscurs de l’ascension sociale en devenant l’image spéculaire et épiphanique de la naissance d’une société dénaturée, où toutes les métamorphoses sociales sont désormais possibles par l’intermédiaire du crime. Car il s’agit bien d’une naissance, exprimée dans les termes d’une création qui fait du criminel un véritable démiurge, modelant le jeune initié à son image. Au rapport tentateur/ damné succède celui de créateur/ créature, rapport qui fait du criminel un nouvel avatar du Père : diabolique et divin se confondent alors en un syncrétisme blasphématoire qui n’est autre que celui de la société post-révolutionnaire française. Mais l’allégeance de la société au Mal et au Crime constitue un véritable péché originel dont la tache doit être lavée : « sachez seulement vous bien débarbouiller : là est toute la morale de notre époque », tel est l’ultime conseil de Vautrin à Rastignac pour parvenir. Mais cette purification est opérée par l’instigateur même du pacte diabolique, ce qui transfigure le personnage démoniaque en un Christ faisant propitiation en lavant sa création de l’opprobre attachée à son origine. Il s’agirait alors de voir en quoi les rapports de force s’inversent, le pacte diabolique faisant de l’enchanteur l’enchanté et du damné l’idole maléfique à laquelle le criminel offre jusqu’à sa vie. Le pacte diabolique balzacien aboutit en effet, dans un paradoxe vertigineux, à la disparition du criminel, ultime révélation d’un transfert de la toute-puissance du crime à l’ambition. Le criminel serait ainsi l’Alpha et l’Oméga d’une société dans laquelle la boue obscure et informe de l’indistinction sociale peut se transformer par l’alchimie du crime en pouvoir doré. Le pacte diabolique ne nous raconterait alors rien d’autre que la Genèse d’une cosmogonie sociale.

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  • HAL Id : hal-01213997 , version 1

Citer

Lauren Bentolila-Fanon. Au commencement était le Crime, et le Crime était avec la Société, et le Crime était la Société : le criminel comme Christ démoniaque de la paternité sociale. Métamorphoses du paganisme en littérature, ELH-PLH, Apr 2015, Toulouse, France. ⟨hal-01213997⟩
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