Le sectétome de Trametes versicolor: vers un indicateur de l’écotoxicité des sols ?

Christian Mougin (1) , Jérémie D. Lebrun (1) , Achref Aloui (1) , Nathalie Cheviron (1) , Nathalie Demont-Caulet (2) , Isabelle Gattin (3) , Karine Laval (3)

1 PESSAC - Physicochimie et Ecotoxicologie des SolS d'Agrosystèmes Contaminés
2 IJPB - Institut Jean-Pierre Bourgin
3 BioSol - Laboratoire d’écologie microbienne

Les activités anthropiques ont conduit à la contamination des sols par des composés chimiques, avec dans certains cas des conséquences écotoxicologiques et sanitaires. Les activités enzymatiques globales sont souvent utilisées pour évaluer les perturbations du fonctionnement des sols, mais l'interprétation des résultats obtenus reste difficile. Ceci est dû en partie à notre mauvaise connaissance de la relation entre niveaux d’expression enzymatique, physiologie des organismes sécréteurs et interférences avec un milieu complexe, le sol. La connaissance des réponses fonctionnelles des champignons du sol exposés aux contaminants pourrait offrir des perspectives dans le développement d’outils pour l’évaluation des risques écotoxicologiques. Dans un premier temps, nous avons étudié l’impact de métaux sur les sécrétomes d’une douzaine de souches fongiques isolées de sols agricoles, et cultivées en milieux liquides. Les études se sont focalisées sur deux familles d’enzymes impliquées dans les cycles biogéochimiques des sols : les hydrolases (phosphatase, β-glucosidase, β-galactosidase et N-acetyl-β-glucosaminidase) et les oxydoréductases (laccase, Mn- et lignine-peroxydases). La réponse des hydrolases aux métaux présente une grande variabilité intracommunautaire. Elle dépend de la souche, du métal et de l’enzyme considérés. A l’inverse, les activités oxydoréductases des souches disposant d’un système oxydatif sont stimulées. Dans certains cas, des oxydoréductases non produites dans les cultures non dopées par les contaminants, sont spécifiquement synthétisées en présence de métaux. Au niveau protéique, nous avons montré que la stimulation des activités oxydoréductases par les métaux est fortement corrélée à la quantité de protéines sécrétées. De par la spécificité, la sensibilité et la généricité de leur réponse, les oxydoréductases fongiques se sont avérées être des biomarqueurs potentiels d’exposition aux métaux. Dans un second temps, nous nous sommes focalisés sur l’étude du sécrétome du basidiomycète Trametes versicolor en considérant 3 conditions d’exposition : champignon témoin, ou exposé à un contaminant métallique, le Cu, ou organique, la 2,5-diméthylaniline. Ces deux composés sont connus pour agir au niveau transcriptionnel sur certaines oxydoréductases (par exemple les laccases) produites par cette souche. Une étude protéomique des protéines sécrétées nous a permis, pour la première fois, de déterminer le profil protéique du sécrétome de ce champignon sur un gel 2D. D’autre part, nous avons pu mettre en évidence des expressions différentielles du sécrétome de T. versicolor en présence de ces contaminants. L’identification de spots protéiques par spectrométrie de masse devrait permettre d’identifier des biomarqueurs potentiels d’exposition aux contaminants, et de confirmer la pertinence des oxydoréductases pour cette finalité.

Domaines: Sciences du Vivant [q-bio]

Christian Mougin, Jérémie D. Lebrun, Achref Aloui, Nathalie Cheviron, Nathalie Demont-Caulet, et al.. Le sectétome de Trametes versicolor: vers un indicateur de l’écotoxicité des sols ?. Colloque Ecologie, Sep 2010, Montpellier, France. ⟨hal-01203991⟩