Une agriculture exemplaire de la fragilité des régions : l'exemple des trois départements d'outre-mer insulaires
Résumé
Extrait : Les données macroéconomiques sur les régions ultrapériphériques (RUP) de l’Union Européenne montrent l’extrême fragilité de ces territoires. Nombreuses sont les études qui soulignent l'intérêt de les considérer de manière singulière1. Il est entendu que le rythme et les déterminants de leur croissance, leur structuration productive, leur insertion au sein du commerce international, etc. justifient un mode de traitement différencié de ces régions au sein de l'Union Européenne. Parmi les mesures d'aide au développement octroyées aux RUP, le secteur agricole n'est pas en reste. Outre les aides compensatoires dont bénéficient certaines cultures, les dispositifs de protection des marchés (Organisations communes de marché, OCM ci-dessous) permettent le maintien d'activités de production agricole dont les enjeux se posent tout autant en termes symboliques qu'économiques. Ceci est particulièrement vrai des RUP françaises que représentent les départements d’outremer (DOM). Il faut rappeler le poids du passé colonial des DOM à l’origine des choix de production agricole et de leur rémanence, faisant du secteur agricole un descripteur d’un certain nombre de réalités prévalant dans ces économies. Comme le soulignent les études réalisées sur les DOM, les handicaps auxquels ils se confrontent sont liés à leur taille, l’éloignement de la métropole éventuellement renforcé par leur caractère insulaire2. En corollaire de ces caractéristiques structurelles, la concentration des activités productives (notamment sur un petit nombre de produits agricoles) accentue la dépendance de ces régions à l'extérieur. La spécialisation agricole choisie dans les DOM participerait ainsi de leur fragilité économique. La constance, voire le renforcement des handicaps liés à l’ultra périphérie, relèvent ainsi à la fois de facteurs structurels – subis par les agents – mais aussi de caractéristiques socioculturelles qui influencent les modes de régulation de ces systèmes productifs. Nous procéderons dès lors à une explicitation de ces mécanismes. Notre contribution comporte ainsi deux volets essentiels. Dans un premier temps, nous essaierons de mesurer la vulnérabilité économique agricole des DOM. Nous proposerons ensuite, à partir d’une relecture du modèle technico-productif en vigueur dans ces régions(entendu comme le substrat de l’organisation productive et institutionnelle d’un territoire) une grille d’analyse des freins existants.