Matchs de football et révoltes urbaines dans l'Italie de l'après-guerre - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Histoire et Sociétés Année : 2006

Matchs de football et révoltes urbaines dans l'Italie de l'après-guerre

Résumé

In post-war Italian cities, when the culture of the tifo spread to every social group from the North to the South of the peninsula, a new ritual settled in. It was a resolutely modern one, it took place in an enclosed space – the stadium – and followed its own calendar – that of the championship season. This phenomenon, both ordinary and massive, was perceived as normal, which as a result made it less visible. However, when tragic incidents occurred, with revolts overflowing the stadium into the urban space, the ritual structure became more legible. The stadium was the stage of a demonstration of power, and what happened there was relevant to the entire community. The article looks at a specific episode – the “Bologna insurrection” of the 5th March 1964 – which, while structured by similar dynamics, revealed previously unseen elements that transformed the meaning of the ritual. In a broader context, those can be interpreted as a symptom of change, of a questioning of the social order in place including in the transgressions that it allowed. That night, the traditional political and religious institutions that had so far legitimated the tifosi's violence and tried to channel it, found themselves unable to control the demonstration. This event marks the emergence of organized groups of football supporters. The slow process of politicization, which emerged in the mid-1960s and developed during the “years of lead” accentuated this feature: the stadium became one of the places, and the game one of the moments of the revolt. A new ritual language, made of songs and flags, came into play. Incidents did not anymore start from the pitch but from the tribunes where the tifoserie, autonomous bodies separated from the urban body, engaged in a political battle. The rise of these groups reflects the efficiency of this ritual, which was recuperated at grassroots level and integrated into a dynamics of confrontation. Urban, social and political identities overlapped, in an entanglement of contradictory and antagonistic representations.
Dans les villes italiennes de l’après-guerre, alors que la culture du tifo se diffuse dans tout le corps social, du nord au sud de la péninsule, se met en place un nouveau rituel, frappé du sceau de la modernité, dans un espace clos, le stade, et selon un calendrier autonome, celui de la saison de championnat. Ce phénomène, à la fois massif et banal, apparaît comme normal, ce qui ne contribue pas à le rendre visible. En revanche, lors d’incidents graves, lorsque la protestation déborde du stade et envahit l’espace urbain, la structure rituelle se donne à lire. Le stade est en effet un lieu de manifestation du pouvoir et ce qui s’y passe engage la communauté civique tout entière. L’article s’intéresse à un épisode particulier – l’« insurrection bolonaise » du 5 mars 1964 – qui, tout en relevant d’une logique de fonctionnement identique, voit affleurer des éléments inédits qui transforment le sens du rituel. Réinsérés dans un contexte plus large, ils peuvent être interprétés comme le symptôme d’un changement, d’une mise en question de l’ordre social tel qu’il s’exprimait y compris dans ses moments de débordement. Ce soir-là, les institutions traditionnelles, politiques et religieuses, qui légitimaient jusque-là la violence des tifosi et tentaient de la canaliser, furent incapables de contrôler la manifestation. On assiste en fait à l’émergence décisive de groupes organisés de supporters. Leur lent mouvement de politisation, amorcé au milieu des années 1960 et qui se déploie pendant les « années de plomb », accentue ce trait : le stade devient un des lieux et le match un des moments de la contestation ; un nouveau langage du rituel, fait de chants et de drapeaux, est élaboré ; l’origine des incidents ne se trouve plus sur le terrain mais dans les tribunes, où des tifoserie, corps autonomes détachés du corps urbain, s’opposent politiquement. Leur affirmation témoigne de l’efficacité de ce rituel, qui est récupéré « par le bas » et inséré dans une dynamique de confrontation. Identités urbaines, sociales et politiques se recoupent, dans un entrelacs de représentations contradictoires et antagonistes.

Domaines

Histoire
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01172058 , version 1 (06-07-2015)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01172058 , version 1

Citer

Fabien Archambault. Matchs de football et révoltes urbaines dans l'Italie de l'après-guerre. Histoire et Sociétés, 2006, 18-19, p. 190-205. ⟨hal-01172058⟩
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