La critique de la television comme logique emancipatoire de l’emprise televisuellle.
Résumé
Toute critique sociale trouve son origine dans des attentes normatives déçues. D’une situation vécue comme injuste
ou de valeurs considérées comme bafouées peut naitre une volonté critique. Face aux désajustements, le critique a un dessein: dévoiler ce qui va mal dans une volonté d’émancipation (cf. Bourdieu, Walzer, Boltanski, Montesquieu, Koselleck). Une histoire de la critique des médias, comme forme de critique sociale, montre qu’elle trouve son origine dans une évolution des pratiques médiatiques considérées comme décevantes, perturbatrices. Ainsi, depuis la naissance du journalisme, l’immoralité de ses (nouvelles) pratiques n’a cessé d’être fustigée. L’évolution médiatique de la fin du XXème siècle et les critiques qu’elle a suscité est tout à fait illustrant: reality-show, Timisoara ou la Guerre du Golfe sont les événements médiatiques d’une période d’intensification des critiques, notamment à l’encontre de la télévision, lieu de cristallisation des reproches faits aux médias.
C’est dans ce contexte que Daniel Schneidermann, alors grand-reporter au Monde et téléspectateur « consentant-réfractaire », va se poser en critique des médias. Son vouloir-faire s’explique par une double insatisfaction morale, celle du journaliste et celle du téléspectateur-citoyen. Née en réaction à la domination symbolique de la télévision sur les pratiques professionnelles et
téléspectatorielles tant en matière d’information que de pratiques sociales, Arrêt sur images manifeste un changement d’attitude, le passage d’un « je regarde » à un « ça me regarde » à double niveau : celui du journaliste acteur-spectateur des productions télévisuelles et celui, via la télévision, du téléspectateur lambda, public de télévision. Le vouloir-faire est double : libérer les téléspectateurs et les journalistes de l’emprise télévisuelle.