Découverte d’ « orgues basaltiques » dans les roches fondues (paralavas) du terril houiller Saint-Pierre de la Ricamarie (Loire, France) - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Autre Publication Scientifique Année : 2014

Découverte d’ « orgues basaltiques » dans les roches fondues (paralavas) du terril houiller Saint-Pierre de la Ricamarie (Loire, France)

Résumé

Le terril, ou crassier, Saint-Pierre a été édifié dès les années trente, et jusqu’en 1983, à partir des résidus (argilites et grès) de l’exploitation houillère dans le bassin de la Loire, en particulier au puits Pigeot (La Ricamarie). Les restes de charbon associés aux roches du terril ont brûlé, provoquant en son sein une forte augmentation de température. On a atteint ou dépassé 1300°C (Guy et al., 2001). En certains endroits, les matériaux ont fondu. Les roches résultantes, appelées paralavas, sont semblables à des basaltes : surfaces scoriacées, textures fluidales telles des laves cordées, craquelures, faciès très vacuolaires etc. Au microscope on ne retrouve pas les textures de roches détritiques, mais bien des textures typiques de roches ayant fondu : minéraux de haute température automorphes (orthopyroxènes, spinelles, cordiérites) dans une pâte constituée de feldspaths alcalins. Dans un secteur montrant des paralavas, dégagé par l’exploitation (pour obtention de granulats), des prismes semblables à ceux observés dans les basaltes ont été observés. Ils ont une section polygonale (diamètre des prismes de l’ordre d’une trentaine de centimètres), et des longueurs visibles de quelques mètres. L’affleurement mis à jour a une vingtaine de mètres d’amplitude horizontale et se poursuit en profondeur et latéralement ; le dégagement par des engins permettra de préciser son extension. Deux grandes hypothèses sont rencontrées pour expliquer la prismation : - H1 : la contraction thermique d’une masse solide qui se refroidit et fait apparaître des fractures (on ne s’intéresse pas alors à la solidification antérieure du liquide) ; - H2 : la formation de digitations du solide dans le liquide lors de la solidification ; dans ce cas, le solide final est structuré dans sa masse et sa contraction éventuelle lors du refroidissement subséquent ouvre de façon préférentielle les joints préalablement formés (Guy, 2010). Les observations originales faites sur place contribuent de façon préliminaire à cette discussion. En particulier, contrairement à ce qui est constaté sur les corps géologiques naturels, les prismes observés dans le terril laissent apparaître entre eux des vides importants irréguliers, verticaux ou horizontaux ; dans le cas des vides verticaux, les concavités des faces adjacentes ne se correspondent pas toujours, les prismes ne s’emboîtant pas parfaitement les uns dans les autres. Les surfaces ouvertes sur ces vides ne sont pas lisses, mais présentent un caractère « grumeleux », comme si du magma avait coulé. Explication possible : la fusion a affecté ici des blocs non consolidés laissant entre eux une grande porosité ; on peut alors imaginer, d’une part des vidanges occasionnelles du liquide à travers les parties « poreuses » sous-jacentes (non soumises à la combustion et à la fusion), et/ou d’autre part des tassements au cours du phénomène de fusion / solidification, laissant apparaître des vides ne se comblant pas forcément par descente des parties supérieures. Les prismes peuvent alors apparaître non soudés entre eux, figés à un stade non terminé de la solidification du liquide qui était situé entre eux et s’est échappé. Cette interprétation (à confirmer) ne s’accorde pas avec H1 et penche en faveur de H2. D’autres facteurs sont à faire intervenir dans la compréhension de la formation de ces prismes et leurs caractères : - le liquide n’a pas été apporté (il n’a pas coulé) et a été formé sur place, l’énergie source de la chaleur se trouvant dans la roche elle-même ; - le régime d’oxydo-réduction est original : la fusion est accompagnée d’une oxydation dans les conditions de la surface de la terre (combustion du carbone), l’évolution du phénomène allant vers une réduction (augmentation de pression partielle de CO2, diminution de celle en O2) : les orgues sont massivement de couleur rouge et leur bordure parfois grise à noire ; c’est l’inverse de la situation standard où le magma arrive plus réduit des profondeurs de la croûte terrestre : roches grises à noires pouvant s’oxyder à leur périphérie par altération météorique dans les conditions de la surface (périphéries parfois rouges). La bordure noire des prismes observés dans le terril est un autre argument de la structuration précoce avant la solidification complète (H2) dans la mesure où l’altération météorique actuelle ne pourrait se traduire par une bordure noire (si on avait H1). Dans la littérature sur les paralavas, le phénomène de prismation (quelle que soit l’interprétation donnée) ne semble pas avoir été observé ; il montre ici une ampleur remarquable et constitue sans doute une des rares occurrences mondiales (la seule ?). Merci à ceux qui ont contribué, directement ou indirectement à cette entreprise. Guy B., Garcia D., Le Coze J. et Theisse V. (2001), Les cahiers de la Rotonde, Publications de l’Université de Saint-Etienne, 61-69. Guy B. (2010) Journal of Volcanology and Geothermal Research, 194, 1-3, 69-73.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01079685 , version 1 (03-11-2014)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01079685 , version 1

Citer

Bernard Guy, Pigeron Stéphanie, Thiéry Vincent. Découverte d’ « orgues basaltiques » dans les roches fondues (paralavas) du terril houiller Saint-Pierre de la Ricamarie (Loire, France) . 2014. ⟨hal-01079685⟩
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