L'imaginaire des personnes aveugles et la représentation des perceptions en discours
Résumé
Cet article dégage les principales tendances observables dans les réponses au concours d'écriture " Dire le non-visuel ", dont l'Appel à participation posait la question : " Comment connaissons-nous le monde et sentons-nous la vie autrement que par la vue ? " (FAFDirelenonvisuel). Le corpus permet de scruter l'apparent paradoxe qui veut que le discours de nombreuses personnes aveugles, y compris congénitales, soit parsemé de termes référant à la vue. Sans sous-estimer l'influence de l'interdiscours saturé de références visuelles, ni le besoin de compenser imaginairement la perte d'un sens prévalent, on montre que le goût de nombreux locuteurs handicapés visuels pour les jeux langagiers possède au moins trois autres causes : la difficulté à formuler en quoi consiste le non voir, le foisonnement des sens figurés liés au lexique de la vision, mais aussi le fait que les sujets ressentent l'activité cognitive destinée à pallier l'absence de la vue comme une herméneutique qui transforme le monde en figure à interpréter.