Sédimentation supratidale de haute énergie générée par des vagues géantes. Le cas des blocs cyclopéens de l'île de Banneg (archipel de Molène, Finistère)
Résumé
Cette étude porte sur l'analyse morphosédimentaire et dynamique des blocs cyclopéens de l'île de Banneg, située à la limite nord ouest de l'archipel de Molène (Finistère). Ces dépôts grossiers sont constitués de dalles rocheuses arrachées au substrat par les houles de tempêtes océaniques attaquant de plein fouet la façade occidentale de l'île. Un relevé topo-morphologique au DGPS de la zone d'étude a permis leur analyse. Ils prennent le plus souvent l'allure de remparts culminants entre 7 et 14,5 m (IGN 69) d'altitude. 52 amas de blocs ont été recensés du nord au sud de l'île, représentant un volume total d'environ 1000 m3. Ils se répartissent en 6 groupes principalement localisés du nord au sud de l'île, au droit des rentrants de la côte. L'analyse granulométrique effectuée sur 908 échantillons montre que la taille médiane des blocs avoisine 0,8 x 0,6 x 0,4 m, pour un poids équivalant à 0,6 tonne. Le plus gros bloc, 5,30 x 3,90 x 0,50 m, situé au centre l'île, pèse 32 tonnes et a été projeté à 14 mètres en retrait de la falaise à une altitude de 9 m. Si la taille des blocs diminue avec la distance par rapport au rivage, aucune relation clairement marquée n'est notée entre ce dernier paramètre et le tri granulométrique. Les mesures du tuilage indiquent que la direction de la houle incidente à l'origine de leur mise en place est de secteur ouest (270°) à nord-ouest (330°) du centre au sud de l'île. L'étude des conditions hydrodynamiques responsables de la mise en place de ces dépôts a été réalisée sur les tempêtes de l'hiver 1989-1990. Les données de houle utilisées correspondent à des simulations numériques du LNHE-EDF calculées au large de Ouessant qui ont été validées à partir des mesures in situ de la bouée BEAIII. Ces données au large ont ensuite été propagées à la côte à l'aide d'un modèle de réfraction du SHOM (CRESTP). Il s'avère que les caractéristiques de houle proche du rivage restent pratiquement identiques que celles du large, avec une atténuation négligeable dans la majorité des évènements. L'étude des conditions hydrodynamiques montre que les niveaux marins extrêmes de débordement (marée observée + run-up) ont pu atteindre près de 19 m (IGN 69) de hauteur (soit 5 à 10 m au dessus des falaises). Toutefois, la submersion a été beaucoup plus importante et fréquente au centre et au sud, qu'au nord et au centre nord de l'île. Un rétro-calcul sur la période 1979-2002 indique qu'aucun épisode aussi morphogène que ceux précédemment cités n'a été enregistré durant ces 24 années. Il apparaît toutefois que la décennie 1979-1990 a été marquée par un nombre important d'épisodes morphogènes, alors que celle qui suit (1990-2002) enregistre une nette diminution de la fréquence des tempêtes.