BioPIQuE 2013 : Rapport méthodologique - Archive ouverte HAL Accéder directement au contenu
Rapport (Rapport Technique) Année : 2014

BioPIQuE 2013 : Rapport méthodologique

Résumé

BioPIQuE 2013 est une expertise collective pluri-disciplinaire et multi-acteurs qui vise à identifier des questions émergentes pour les politiques publiques de biodiversité à l’horizon 2020. Ce projet a été lancé par le ministère de l’écologie, conjointement avec AgroParisTech, début 2013. L’élaboration, la mise en oeuvre et l’évaluation des politiques publiques de biodiversité nécessitent d’anticiper les conséquences des décisions qui sont prises aujourd’hui. Pour cela, des études et des recherches sont lancées sur de nouveaux sujets. Cependant, il s’avère qu’elles sont souvent peu mobilisées et arrivent parfois trop tard par rapport à la définition des orientations des politiques. L’anticipation est encore compliquée par l’existence de nombreuses informations sur les évolutions possibles de la biodiversité et des politiques publiques associées, parmi lesquelles il s’agit de faire le tri. Parmi ces évolutions, quelles sont celles dont les impacts sont potentiellement les plus importants, sur la biodiversité elle-même ou sur d’autres objets ? Quelles sont celles pour lesquelles l’anticipation permettrait de limiter les impacts négatifs et d’accroître les impacts positifs ? Quelle est leur plausibilité à court, moyen et long terme ? Il s’agit donc pour BioPIQuE 2013 de dépasser les travers des anticipations spontanées grâce à une méthode rigoureuse de prospective. Une question émergente est un sujet, un problème, un enjeu ou un thème identifié depuis peu de temps, pour lequel il existe un enjeu d’action et dont les évolutions futures possibles ou les conséquences de ces évolutions ne sont pas encore connues ou prises en charge. Identifier ces questions vise à se donner les moyens d’anticiper la montée en puissance de nouveaux objets de politiques publiques, l’organisation de nouvelles interactions entre des politiques existantes ou la définition de nouvelles options pour prendre en charge les enjeux de biodiversité. Les questions identifiées doivent permettre d’agir maintenant, et c’est une des raisons pour lesquelles l’horizon choisi est proche et en cohérence avec l’horizon de la Stratégie Nationale pour la Biodiversité 2011- 2020 (SNB). Les politiques publiques de biodiversité sont au coeur de BioPIQuE 2013. Elles désignent l’ensemble des actions menées par les acteurs publics, seuls ou en partenariat, afin de freiner voire de stopper la perte de biodiversité, telles que définies dans la SNB 2011-2020. Elles contribuent à la mise en place et à la régulation des interactions entre les acteurs concernés et traitent autant des questions de décision que de mise à l’agenda, de conception, de mise en oeuvre et d’évaluation de ces décisions. Les politiques publiques de biodiversité sont influencées par la demande sociale en faveur de la biodiversité, par l’état et les évolutions passées des espèces et des milieux naturels, ainsi que par leur propre histoire, qui explique pour partie les structures institutionnelles et les jeux politiques actuels. Elles rétroagissent sur la demande sociale, qu’elles la satisfassent ou la stimulent, et sur la production des connaissances, par exemple en formulant de nouvelles demandes, en finançant la recherche, en organisant la capitalisation des expériences de gestion. La capacité à décider, efficacement et dans des délais appropriés, de la réponse à apporter à une question émergente sera en partie déterminée par les relations complexes entre acquisition de connaissances, jeu institutionnel et politique, et pression sociale. De la formulation d’une question à la mise en oeuvre d’une solution pertinente, en passant par son traitement, scientifiques, politiques et acteurs de la société civile jouent un rôle fondamental à chaque étape du processus. Ce sont ces acteurs qui peuvent identifier les questions émergentes : les scientifiques parce que leurs connaissances de la biodiversité et des politiques publiques les placent à la frontière de l’innovation, les acteurs de l’action publique, qui connaissent les limites et les potentiels des modes de fonctionnement actuels, et les représentants de la société civile, qui portent de nouveaux enjeux ou revendiquent que des sujets récurrents soient enfin pris en charge. Ils sont donc tous impliqués dans BioPIQuE 2013. Trois principes méthodologiques ont guidé ce travail : (1) L’identification des questions émergentes doit être utile pour l’élaboration ou la révision des politiques publiques de biodiversité. Sans aller jusqu’à la définition d’une stratégie d’action pour répondre à l’émergence potentielle des questions identifiées, le projet doit fournir les éléments permettant que ces questions émergentes soient traitées par les acteurs compétents s’ils le souhaitent, en fonction de leurs propres objectifs. (2) Le projet doit s’inscrire en complémentarité avec les démarches existantes (en particulier, mobilisation des démarches de prospective déjà réalisées par le ministère en charge de l’écologie ou par d’autres acteurs). (3) L’identification des questions émergentes doit permettre une articulation entre des porteurs de connaissances et des acteurs de l’action publique en faveur de la biodiversité. En effet, l’identification des questions émergentes est une étape vers l’action en faveur de la biodiversité, qui nécessite de travailler à l’interface entre l’expertise scientifique et technique et l’action publique. Grâce à une revue de la littérature et à quelques entretiens exploratoires, le protocole de BioPIQuE a été défini au printemps 2013. Il articule plusieurs niveaux de participation : une consultation à distance, ouverte à toute personne qui se sentirait compétente sur le sujet ; deux séminaires, autour d’un groupe de participants choisis intuitu personae (le « groupe central »); et deux réunions de synthèse, auxquelles participe le bureau. La définition de ces trois cercles d’expertise résulte d’une démarche à la fois pragmatique (sollicitation des têtes de réseaux de l’action publique et de la connaissance) et thématique (définition de profils d’expertise à mobiliser en priorité). La journée de mise en contexte vise à placer les membres du groupe central dans une dynamique de prospective notamment en identifiant des tendances lourdes, qui dessinent le contexte futur de l’action. Cette journée est aussi l’occasion pour les participants du groupe central de se familiariser avec le projet, afin qu’ils puissent le relayer dans leurs réseaux. La consultation à distance permet de faire remonter des propositions de questions émergentes. Elle s’appuie sur un questionnaire qui, en plus de quelques éléments descriptifs, propose une section réflexive permettant de s’interroger sur le lien à l’action, et sur l’impact de la question émergente proposée si celle-ci venait à prendre de l’ampleur. L’ensemble des propositions issues de la consultation à distance constitue le corpus de départ (79 propositions) sur lequel travaillent les membres du bureau et du groupe central lors du séminaire. Après la consolidation du corpus (58 propositions), il s’agit de sélectionner les questions qui feront partie des résultats du projet. Cette étape s’appuie sur un processus délibératif de sélection positive des propositions (et non sur l’élimination par des filtres automatiques), sur la base de cinq critères : (1) le caractère réellement émergent de la question, du point de vue de l’action publique, (2) l’impact potentiel de la question sur la biodiversité ou d’autres secteurs, (3) les conséquences potentielles de cette question pour l’action publique, (4) la plausibilité que la question prenne de l’ampleur à l’avenir, (5) l’intérêt de l’anticipation de cette question. Une caractéristique importante de cette expertise est la transparence (via la traçabilité des propositions de questions émergentes et des contributeurs). A l’issue de l’exercice 2013, 25 questions émergentes pour les politiques publiques de biodiversité ont été sélectionnées, dont 10 enjeux stratégiques identifiés par les membres du bureau. Il est encore trop tôt pour tirer l’ensemble des enseignements de la conduite de BioPIQuE 2013. Cependant, quelques points forts peuvent être soulignés. Ils sont issus d’une analyse attentive du déroulé de l’exercice et de ses résultats, et de discussions informelles avec les participants. Le sujet de BioPIQuE 2013 (identification des questions émergentes) suscite un intérêt certain. Si les résultats sont peut être moins surprenants que ce que l’on attendait au départ, car nous sommes bien au coeur des politiques publiques de biodiversité, ils sont néanmoins constitués de questions précises, en lien avec l’action, qui ne sont actuellement pas traitées par l’action publique en faveur de la biodiversité. L’absence de questions purement de recherche (même si la recherche peut se saisir de chacune de ces questions) montre que nous avons atteint notre objectif de cibler l’action publique en faveur de la biodiversité. La pertinence des résultats ne sera cependant assurée que par l’utilisation que les acteurs en feront et nous avons d’ores et déjà eu des sollicitations pour les mettre en discussion. L’originalité de la méthode tient à son caractère inédit en France, mais aussi à ses caractéristiques propres. La journée de mise en contexte a permis de faire collectif, d’entrer dans une dynamique prospective et de lancer le projet grâce à une compréhension partagée de ses enjeux et de sa méthode. Il semblerait cependant nécessaire de mieux rappeler les résultats de cette journée tout au long du processus (consultation à distance et séminaire de sélection des questions) afin d’entretenir la dynamique prospective. Le travail méthodologique et conceptuel approfondi pose le lien à l’action comme principe structurant et contribue tout au long de la mise en oeuvre du dispositif à formuler des questions émergentes les plus concrètes possibles. Ce travail méthodologique a par ailleurs mené à la mobilisation de quatre formes d’émergences pour structurer la réflexion sur le long terme et leur inscription dans une série de tendances lourdes qu’il convient de prendre en compte comme contexte dans lequel les questions émergentes sont susceptibles d’évoluer. Ces formes d’émergence, si elles n’apparaissent pas directement dans les résultats et n’ont pas été utilisées pour classer les questions, ont néanmoins été particulièrement importantes tout au long de la réflexion de l’équipe et du groupe central. La phase de consultation à distance a permis de recueillir un nombre satisfaisant de propositions. Elle gagnerait néanmoins à être scindée en deux étapes : une première avec un questionnaire restreint, mais diffusé encore plus largement que cela a pu être fait, afin d’atteindre encore plus de contributeurs qui soient à la marge du champ thématique, et une seconde qui reviendrait vers les contributeurs ou vers de nouvelles personnes afin d’approfondir des propositions qui auront été pré-sélectionnées. Cet « effet » entonnoir, qui permet de calibrer l’investissement de chacun en fonction de l’étape du processus (plus on avance dans la sélection des questions, plus il convient d’être précis quant à leur formulation), pourrait par ailleurs être mobilisé lors du séminaire de sélection des questions afin de faciliter le travail du groupe central. L’utilisation de critères précis pour la sélection des résultats finaux et le choix d’un mode de sélection délibératif et non électif a permis de laisser une grande place à l’argumentation : celle-ci a apporté non seulement des éléments précieux pour décrire le contenu des questions émergentes, mais aussi une légitimité et une qualité dans le choix des questions. Le principal défaut de cette approche est probablement que les décisions sont prises au consensus dans la plupart des cas, et que cela peut donc tendre à lisser les résultats. Il convient de pallier cette difficulté en 1/ redoublant d’efforts dans l’identification d’experts moins consensuels pour proposer des questions et en 2/ acceptant un mode de décision démocratique et non au consensus lors de la sélection des questions. Enfin, l’effort de formulation des résultats finaux et leur classement selon les moments de l’action publiques (et non selon les catégories classiques de l’action en faveur de la biodiversité), leur permet d’être percutants, voire pour certaines questions « stratégiques », au dire des membres du bureau. Il nous reste à suivre le devenir de ces résultats afin de mesurer leur impact sur l’action publique et sur la biodiversité.
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)
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Dates et versions

hal-01184908 , version 1 (18-08-2015)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01184908 , version 1

Citer

Audrey Coreau, Pauline Conversy. BioPIQuE 2013 : Rapport méthodologique. [Rapport Technique] AgroParisTech, pour le ministère en charge de l'écologie. 2014. ⟨hal-01184908⟩

Relations

  • illustre https://hal.science/hal-01184907 - Le présent document décrit la méthode détaillée ayant mené aux résultats présents dans le document hal-01184907
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