Les bibliothèques ecclésiastiques, fabrique de l'orthodoxie
Résumé
Les bibliothèques ecclésiastiques constituent moins, comme on l'affirme souvent, un " portrait " intellectuel des communautés religieuses, qu'une esquisse d'un horizon de pensée normatif. L'architecture des classements, les modalités de surveillance des acquisitions et de la lecture, le caractère répétitif des livres possédés dans la plupart des abbayes et couvents, l'adéquation entre les livres possédés et les enseignements dispensés aux jeunes profès, plaide en faveur de cette interprétation du contenu des bibliothèques. Pour autant, au sein d'un périmètre intellectuel défini comme orthodoxe et conforme, reste une large part d'interprétation et de choix d'approches diverses, notamment dans le domaine de l'exégèse et de la scholastique. En dehors de ce périmètre, le domaine de l'interdit souffre en outre de définitions mouvantes. L'étude des pratiques de lecture, quand elle est possible, montre que la plupart des religieux se sont conformés à cette orthodoxie de pensée, mais non sans quelques hésitations. Des lectures ont lieu en effet hors de la bibliothèque commune, et chez quelques figures d'exception, comme le minime Claude Pithoys converti au protestantisme, la lecture semble avoir eu des effets dévastateurs. Finalement, la bibliothèque constitue un point de repère pour la société monastique, mais pas un horizon indépassable de lecture.
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)